Tour de Corse du Kallisté
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Jour 19 : samedi 3/08/2103

Agosta - La Parata (22 km)

Levé à 5 heures 45 : la mer est belle, il n’y a pas de vent.

Je prends un petit déjeuner en finissant une part de pizza de la veille et finis la bouteille de jus de fruits.

Mise à l’eau à 7 heures 30 et c’est parti pour ma 17e étape. Je me dirige vers la Pointe de Porticcio que j’atteins à 8 heures. De là, je change de cap pour entreprendre la traversée du Golfe d’Ajaccio. Le compas de route est posé devant moi sur le pont du kayak et je m’en servirai pour vérifier ma route afin d’aboutir (en face) à la sortie d’Ajaccio.

A mi parcours j’aperçois un ferry quittant le port de commerce d’Ajaccio. Je crains pendant un moment de rencontrer ses vagues d’étrave mais il n’en sera rien, il est trop loin et les vagues mourront avant que je n’arrive à leur niveau. Un peu plus loin, j’aperçois devant moi (à 200 mètres environ) des ailerons fendant les flots. Cette fois ci pas de doute, il s’agit bien de dauphins. Un groupe de cinq grands dauphins se dirigeant vers l’intérieur du Golfe. L’instant est féerique et mon regard ne les quitte pas. A ce moment, j’ai ma mini caméra fixée sur ma tête par un bandeau. Je la mets en route pour immortaliser cette rencontre. J’entends un "bip, bip". Mauvais signe, mais j’espère quand même que ça filme.

Je constaterai plus tard que la scène n’a pas été prise et que les "bip, bip" entendus signifiaient que la batterie était vide. Enfer et damnation ! Maudites soient les batteries qui se vident et mon oubli de les recharger. S’il y avait une scène vidéo qui me tenait à cœur de rapporter de mon voyage, c’était bien celle-ci et je ne sais pas si j’aurai à nouveau l’occasion de faire une telle rencontre.

9 heures 10 : j’accoste enfin la plage Maestrellu, à la sortie d’Ajaccio, où débute la route des Sanguinaires.

J’investis la paillote "chez Gérard" et pendant que je sirote une menthe à l’eau bien fraîche puis bois un café, je recharge cette fichue batterie à l’aide de mon panneau solaire.

Plus tard, alors que je me prépare à repartir, un homme et son petit garçon (5 ou 6 ans) s’approchent de moi. Il me dit que son garçon est en admiration devant mon kayak. Il lui explique que la Corse est une île et que j’en fais le tour en kayak. Nous discutons un moment de mes étapes passées et à venir, de la beauté des paysages, etc…

10 heures 30 : je repars. Peu après, longeant la côte, un kayakiste m’interpelle de son kayak que je rattrape.

A vue d’œil je l’estime plus âgé que moi et lui donne 70 ans au moins. Cette rencontre avec un doyen me rassure et me laisse présager de pouvoir encore longtemps profiter du Kallisté pour de futures sorties.

Mis au fait de mon périple, il me dit être en admiration (encore !) et me salue en retirant sa casquette bien bas. Il me confie que plus jeune, vers 25 ans, il a été champion de kayak avec l’équipe d’Espagne.

La mer est très belle… pas de vagues. Je longe la côte tranquillement jusqu’à la plage Marinella qui borde la route des Sanguinaires.
J’y accoste à 11 heures 30 après avoir reçu les encouragements et félicitations d’une baigneuse pour mon Tour de Corse en "canoë" (beaucoup de gens ne font pas la différence entre canoë et kayak). Je cale le Kallisté sur cette belle plage de sable fin et me dirige… vers la paillote "les Girelles". Après tout, c’est l’heure. Une mauresque bien méritée en apéro et pour repas, un faux filet maître d’hôtel. Il faut soigner la bête et faire réserve d’énergie, non ? (La suite prouvera que oui).

Départ à 15 heures.
Passé la pointe de Scudo qui m’abritait jusque là, je me trouve confronté à un vent de face plutôt fort qui lève une houle courte sur laquelle le Kallisté danse allègrement. Je dois m’éloigner de la côte pour éviter les nombreux hauts fonds et dois lutter dur contre le vent et les vagues qui semblent vouloir ne pas me laisser passer. Les éléments sont si puissants que parfois j’ai l’impression de ne pas avancer, voire de reculer. Si la matinée a été tranquille, ce n’est plus le cas cet après midi, qui est plutôt rude, surtout après le déjeuner.

16 heures 15 :
J’aborde une plage bondée de monde, mais n’ai guère le choix si je veux me reposer, car le reste de la côte est plutôt rocheuse et peu propice à un arrêt. C’est la plage de "la Terre Sacrée". Elle a la particularité de posséder en son centre un petit monument caractéristique. C’est en fait une des six bornes commémoratives de la Grande Guerre, renfermant chacune une urne qui contient un échantillon de la terre des plus atroces champs de bataille.

Il y a aussi un autre monument moins historique et que je sais repérer de très loin en mer… une paillote.

Pour arriver là, j’ai dû certainement mettre deux fois plus de temps qu’il m’aurait fallu en condition météo normale. J’ai bien mérité un peu de repos.

18 heures :
Nouveau départ avec pour objectif de passer la Pointe de La Parata. Je longe la côte à une centaine de mètres en essayant de repérer les endroits où il me serait possible de m’abriter si je ne parvenais pas à passer la Pointe. On est jamais trop prudent.

La Pointe de La Parata est en vue, je l’approche. Une falaise tombant à pic dans la mer, surmontée d’une Tour Génoise que de nombreux touristes visitent en empruntant le chemin de terre qui y conduit. La mer est encore praticable mais je sens que de l’autre côté ce ne sera pas la même musique. Me voici dans le passage, au pied de la Tour .

Deux gros bateaux de promenades me viennent de l’avant, me croisent, s’éloignent et me laissent de grosses vagues qui me font danser. Un vrai rodéo sur l’eau.

Entre la Tour et les Îles Sanguinaires (en face), un goulot où la mer semble se déverser de manière anarchique.

Comme je l’avais prévu la mer forcit, les vagues grossissent et le vent de face contrarie ma progression.

Tout cela réuni me fait souffrir, et je dois utiliser toutes mes forces et ma volonté pour passer cette fameuse Pointe. D’un rapide coup d’œil vers le haut de la falaise, je distingue un jeune couple de touristes, assis près du bord. Ils me regardent valser sur les vagues et doivent sans doute faire un pari sur mon éventuel chavirage.

Je reporte mon regard devant moi pour me consacrer à ma navigation et ne pas me laisser surprendre par une vague traîtresse. Des creux de un mètre au moins se succèdent à grand rythme. Les hautes vagues tapent et me mouillent, couvrent le pont du kayak et remplissent l’hiloire à moitié.

Ouf ! Je passe ! Je suis passé…

Je plonge dans la baie derrière la Pointe, me dirigeant vers la côte en face où je repère une petite crique. Le vent se calme, les vagues s’apaisent, enfin ! Je ne trouve pas la belle plage de sable espérée mais un rivage de cailloux et graviers me laissant juste la place pour accoster.

A la guerre comme à la guerre, je n’ai pas le choix et il est temps de souffler un peu. Il est 19 h 15.

Une maisonnette inoccupée trône en contrefort. Plus haut dans le maquis sont cachées deux petites habitations, sans doute de pêcheurs. Il n’y a personne, je suis seul sur une rive au confort sommaire.

Il ne sera pas facile de trouver sur cette plage de gros galets, un endroit acceptable pour mon bivouac, mais je ferai avec.
De là, je peux voir l’autre côté de la Tour Génoise ainsi que les Îles Sanguinaires.

Il n’y a pas de réseau mais je parviens à capter la météo sur la VHF à 20 h 30. Dure journée !

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